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Publication du rapport final du projet eREF, État de référence de la biodiversité en vertébrés dans les masses d’eaux côtières méditerranéennes à partir de l’ADN environnemental

Le rapport complet eREF (68 pages) est disponible sur la plateforme Medtrix : https://medtrix.fr/portfolio_page/piscis/

Ce projet porté par l’Université de Montpellier en partenariat avec les entreprises Andromède océanologie et SPYGEN et avec le soutien de l’agence de l’eau RMC vise à recenser la diversité des vertébrés (poissons osseux et cartilagineux) qui pourrait se rapprocher du littoral et remonter des profondeurs dans le contexte exceptionnel de très faibles perturbations (loisirs, pêche nuisances sonores, etc..) en lien avec le confinement strict du printemps 2020. Nous avons profité de cette situation sans précédent pour rééchantillonner des sites visités en 2018 ou 2019 et établir les références d’indicateurs biologiques à la fois sur les sites anthropisés (ports et points forts identifiés dans le réseau IMPACT), les aires marines protégées (AMPs) et la zone mésophotique (50-100 m). Au total 204 échantillons ont été analysés.

A partir de ces données, 14 indicateurs de biodiversité (Richesse spécifique, Diversité fonctionnelle, Diversité phylogénétique, Indice « grands poissons », Indicateur crypto-benthique, Ratio démerso-pélagique / benthique, Indicateur « Red List » (UICN), Indicateur non-indigène, Indicateur thermique des poissons, Indicateur élasmobranche, Indicateur niveau trophique, Indicateur commercial, Indicateur hautement commercial, Indicateur de vulnérabilité) ont été calculés afin d’évaluer l’état des eaux côtières en matière de biodiversité des poissons. Les résultats sont consultables à travers la plateforme MEDTRIX dans le projet PISCIS.

Nous montrons que la richesse spécifique en poissons a augmenté de plus 30 % pendant le confinement à la fois dans les zones pêchées et dans les AMPs. Cependant, cette augmentation de richesse pendant le confinement ne concernait ni les espèces de poissons menacées (liste rouge de l’UICN) ni la diversité fonctionnelle. Ces résultats suggèrent que le rétablissement complet de la diversité d’espèces et de la diversité en traits peut nécessiter plusieurs décennies de protection car le confinement drastique n’a pas offert à court terme un rebond de la biodiversité dans toutes ses dimensions.

Parallèlement, nous avons incrémenté la base génétique de références pour les poissons osseux marins de Méditerranée sur la partie 12S du génome mitochondrial afin de mieux assigner les fragments d’ADN environnemental à des espèces : 178 séquences de 39 espèces supplémentaires ont enrichi la base en 2021. Toutes les analyses présentées dans ce rapport ont été réalisées à partir de la liste d’espèces générée grâce à cette nouvelle base de références.

Nous avons également travaillé sur les méthodes d’échantillonnage en mer afin d’avoir la capacité de proposer le protocole le plus adapté à la question posée. Nous avons montré que :

  • une plus grande quantité d’eau filtrée (60 L) apporte une plus grande quantité d’ADN sans risque de colmatage pour le filtre, et qu’il est préférable d’ouvrir la vis de purge d’air pendant quelques secondes en début de filtration.
  • les assemblages d’espèces sont très similaires peu importe le moment de la journée sur deux jours consécutifs,
  • les méthodes d’inventaire visuel en plongée (UVC) et par ADNe sont complémentaires et nécessaires pour un inventaire exhaustif.
  • les communautés sont semblables pour les points fixes et les transects bien que le déplacement de la pompe lors de la filtration permette d’identifier un plus grand nombre d’espèces.
  • l’échantillonnage par Niskin est moins efficace que les filtrations in-situ pour capturer la diversité spécifique,
  • des communautés similaires de poissons sont inventoriées avec un échantillonnage par transect de surface et un échantillonnage par transect au fond (entre -11 et -18 m) bien que ce dernier détecte plus d’espèces de fonds et notamment plus d’élasmobranches.
  • sur des sites profonds (au-delà de 60 m au moins) l’échantillonnage en surface ne permet pas de capter les espèces profondes et les assemblages détectés en surface et au fond sont différents.

 

Nous avons testé une approche multi-amorces pour détecter une large gamme d’organismes. L’analyse des communautés bactériennes et/ou eucaryotes par l’ADNe semble intéressante pour caractériser les masses d’eau et établir des indicateurs de référence par type de milieu (zone côtière, zone protégée, estuaire, lagune, zone portuaire etc.), zone géographique et type d’habitat ; mais également pour le suivi des souches bactériennes pathogènes. Nous avons confirmé que l’utilisation d’un marqueur ciblant spécifiquement les poissons augmente le pouvoir de détection des espèces rares, et permet donc des inventaires poissons plus complets : le marqueur teleo, spécifique aux poissons, permet de détecter un plus grand nombre d’espèces (90 espèces sur les 16 échantillons) que le marqueur généraliste Vert01 (57 espèces sur les 16 échantillons), et en particulier un plus grand nombre d’espèces rares. Toutefois, la combinaison des deux marqueurs (cout de séquençage doublé) permet un inventaire plus exhaustif que chaque marqueur séparément. Pour les mammifères, les deux marqueurs détectent la présence de la famille Delphinidae uniquement, mais le niveau spécifique ne peut pas être déterminé.

Enfin, un guide méthodologique pour le déploiement des méthodes ADNe en milieux marins côtiers et le calcul des indicateurs sera publié au cours du dernier trimestre 2023.